Les rondeurs de la tendresse, de la douceur, de la grâce et de la volupté
« C’est la personne humaine, libre, créatrice et sensible qui façonne le beau et le sublime, alors que les masses restent entraînées dans une ronde infernale d’imbécilité et d’abrutissement » – Albert Einstein
Dans ce monde de normes établies par des modes et des sociétés que seul le profit intéresse, dans cet environnement de jugement, de doigt levé accusateur « pour n’être pas comme il faudrait être », combien de personnes s’estimeront en « surpoids » sans qu’il n’y ait à cette affirmation aucune raison pathologique, aucune dangerosité avérée, fondamentalement aucune raison ?
Combien de personnes en seront malheureuses, tristes, complexées, et finiront par ne pas voir la grâce et la volupté des courbes ? Combien finiront par oublier la beauté de la personne elle-même, dans tout ce qu’elle exprime de bonté, de joie de vivre, de tendresse et de douceur ? Combien, de ce fait, gâcheront de leur temps de vie à lutter contre elles-mêmes ou à se limiter dans leur être ?
Bien des artistes peintres pourtant, et parmi les plus grands, Renoir, Rembrandt, Degas, pour ne citer que mes préférés, avaient pour muse ces femmes aux rondeurs tranquillisantes, et aux beautés peintes sous tous les tons. Les sculpteurs ne sont pas en reste. Ils se délectent tant de la courbe que dans leurs œuvres, on ressent le mouvement de leur bras, la caresse de leur main sur l’œuvre. Et à notre tour, on veut « toucher » dans un mouvement lent qui ne s’arrête plus et glisse, emporté par la courbe : c’est une invitation à la danse.
On nous fera croire sans doute qu’il s’agit d’époque, que la « mode » n’est plus à cette opulence. Il n’en est rien. Maillol, Botéro, et d’autres, ne n’inspirent que dans la générosité des courbes et du rond.
Ma plus belle (et récente) rencontre avec la beauté de la rondeur fut avec Madame Rose-Aimée Belanger. Cette dame, à l’humilité si grande qu’elle s’étonnait encore 25 ans après du succès rencontré par ses œuvres, traduit dans ses sculptures tant de douceur et de tendresse, qu’elle fait vibrer en nous une corde très profonde. Elle témoigne elle-même de cette spontanéité dans son art : quelque chose lui est commandé. Elle doit exagérer la rondeur, car c’est elle qui est porteuse de la tendresse. Ainsi, elle ne représente pas la réalité : elle la magnifie en ayant touché à l’âme de la personne humaine. Elle nous donne à voir, sans aucun artifice, combien les rondeurs sont belles et inspirent la volupté. Elle ne représente pas les femmes du monde, les déesses, pas plus que les femmes séductrices ou objet de convoitise. Elle représente la femme dans son quotidien, dans ses situations de vie, dans ses amours. Et justement, il y a tant d’amour dans leurs mouvements, dans leur posture, tant de bien-être qu’il semble qu’elles détiennent le secret d’un certain art de vivre.
Regardez comme elles sont séduisantes, radieuses, paisibles, rayonnantes…
Pour « rencontrer » Madame Rose-Aimée Bélanger en personne et l’écouter témoigner de son œuvre. Elle avait alors 85 ans, elle en a maintenant 97.